En ce début 2018, l’Angleterre et le Pays-de-Galles sont victimes d’un surcroît de mortalité
En ce premier trimestre 2018, ce sont 10,000 décès supplémentaires qui ont endeuillé le pays par rapport aux années précédentes, selon les chiffres publiés par le très sérieux British Medical Journal. L’examen des statistiques fait apparaître que l’épidémie de grippe et le grand froid qui a sévi cet hiver ne sont responsables que de manière marginale dans ces statistiques. Ce constat alarmant est amplifié par une alerte de l’Office for national statistics qui a mis en lumière une remise en cause de l’espérance de vie en Grande-Bretagne.
Selon les projections publiées en octobre 2017, l’ONS annonce une espérance de vie en 2041 de 86.2 ans pour les femmes et 83.4 pour les hommes. Ces estimations sont inférieures d’une année à celles qui avaient été élaborées en 2016. Signe d’une dégradation des conditions de vie au Royaume-Uni.
Ce tournant a été confirmé par les études du BMJ. Sur les 7 premières semaines de 2018, pour l’Angleterre et le Pays-de-Galles, 93,930 personnes sont décédées. En moyenne, lors des cinq précédentes années, ce sont 83,615 qui sont mortes sur la même période. La hausse des décès est significative : 12.4%.
Le froid ne peut pas être tenu pour responsable, puisque ces 49 jours ont été, au contraire, inhabituellement doux, relève le BMJ. En revanche, le National Health Service (NHS – le service public de santé) était, déjà, en pleine crise. Plusieurs milliers d’opérations considérées comme non urgentes ont été annulées en raison du manque de personnel et de l’afflux de patients. Pourtant, l’épidémie de grippe ne semble pas expliquer le surcroît de mortalité enregistré en ce début d’année. Selon les chiffres disponibles, les maladies respiratoires au sens large, incluant la grippe, sont responsables de 18.7% des décès, contre 18.3% en 2017.
Le BMJ pointe également une augmentation importante de la mortalité parmi les personnes atteintes de maladies mentales (de la dépression jusqu’au handicap lourd) suivies en Angleterre et au Pays-de-Galles. Il avait déjà mis en lumière une hausse générale de la mortalité infantile, depuis 2015. Cette hausse est totalement portée par les décès d’enfants dans les milieux pauvres, qui ne cessent d’augmenter depuis 2011.
Le BMJ rappelle que la mortalité infantile est un « indicateur raisonnable des conditions socio-économiques qui affectent les enfants« . Concernant la hausse générale des décès enregistrée cette année, le vénérable bulletin se contente d’une litote pour indiquer :
« Les cinq dernières années ont été difficiles en termes de situation sanitaire. Les dépenses de santé et d’aide sociale au Royaume-Uni, d’une année sur l’autre, ont augmenté à un rythme beaucoup plus lent que dans des années précédentes. »
En 2017, une étude de l’université d’Oxford avait pris moins de gants. Elle avait affirmé que l’on peut « vraisemblablement » établir un lien entre l’austérité budgétaire, à l’échelle du pays et dans tous les secteurs, et la hausse de la mortalité. Les chercheurs chiffrent la surmortalité provoquée par la politique menée par le gouvernement conservateur à 30.000 décès pour la seule année 2015 par rapport à l’année précédente, l’écart le plus élevé depuis la seconde guerre mondiale.
Désormais, un nombre croissant de professionnels de la santé et du secteur social appellent à une enquête parlementaire sur cette hausse de la mortalité.