Ecosse : Nicola Sturgeon se lance dans une course d’obstacle vers un référendum sur l’indépendance

Chacune respecte ses propres engagements. Theresa May, la première ministre conservatrice britannique, a toujours affirmé que, tenant compte du référendum de juin 2016, elle engagerait la Grande-Bretagne dans la sortie de l’Union européenne. Nicola Sturgeon, première ministre nationaliste de l’Ecosse, a toujours martelé que la sortie du Royaume-Uni de l’Union serait l’occasion d’une consultation populaire sur l’indépendance de l’Ecosse. Elle l’a confirmé ce lundi 13 mars lors d’un discours solennel.

Forte de sa majorité à la Chambre des communes, Theresa May devrait, en toute logique, être autorisée mardi 14 mars à l’issue du dernier vote sur le projet de loi à activer l’article 50 du Traité de Lisbonne. Comme elle l’a toujours annoncé, la première ministre du Royaume-Uni tient sa feuille de route pour la fin du mois de mars. Elle peut lancer le processus de sortie avant fin mars 2017. Il n’y a pas de précipitation, le gouvernement l’a encore confirmé ce jour.

Nicola Sturgeon a donc décidé de prendre date. La veille du vote définitif à la Chambre des Communes, elle a effectué une déclaration solennelle. Il y aura bien un nouveau référendum sur l’indépendance de l’Ecosse et il est intimement lié au Brexit. L’Ecosse s’est en effet prononcée à plus de 60% en faveur du maintien dans l’Union européenne.

Nicola Sturgeon a bien pris soin de préciser que le référendum aura lieu, entre l’automne 2018 et le printemps 2019, après la fin des négociations sur la sortie de l’Union européenne.

« La tenue du référendum – quand les termes du Brexit seront connus – donnera au peuple écossais la possibilité de s’exprimer sur le changement que nous voulons »

La présence continue de l’Ecosse dans le « plus grand marché unique de la planète », selon la première ministre écossaise, est présenté comme l’argument principal pour justifier une nouvelle consultation après le référendum de septembre 2014, qui a vu l’indépendance repoussée par 55% des voix.

Lors des élections au parlement écossais de 2016, le Scottish national party, formation dirigée par Nicola Sturgeon, n’avait évoqué l’indépendance qu’en cas de changement caractérisé des circonstances, en citant la question européenne comme l’une d’entre-elles. Les nationalistes écossais peuvent donc se référer à leur manifesto pour exiger que le nouveau référendum ait bien lieu.

En effet, les conservateurs au pouvoir à Londres, mais qui constituent aussi la principale opposition aux nationalistes au parlement écossais, ne cachent pas leur refus de voir tenu un nouveau référendum. Or, aux termes des lois de devolution (la décentralisation version britannique), un vote favorable de la chambre des Communes est indispensable pour que le référendum sur l’indépendance de l’Ecosse ait lieu de manière valide.

Le parti tory peut rappeler que Sir Alex Salmond, premier ministre écossais d’alors, et David Cameron, locataire du 10 Downing Street à cette époque, s’étaient accordés sur le fait que le référendum de septembre 2014 engage les deux parties « pour une génération ». Donc, bien plus que trois ans…

Nicola Sturgeon, qui a succédé à Alex Salmond, vient donc d’engager une partie cruciale avec Theresa May. La première ministre écossaise a pris bien soin de rappeler que son homologue de Londres engage le pays entier vers un « Brexit dur ». Elle a tenu à citer le manifesto du SNP, qui a remporté les élections régionales de 2016 :

« Le parlement écossais devrait avoir le droit de tenir un autre référendum s’il y a un changement matériel significatif des circonstances qui prévalaient en 2014, comme le fait que l’Ecosse soit exclue de l’Union européenne contre son gré. »

Depuis le gouvernement travailliste de Clement Attlee, qui a été élu en 1945 sur la base d’un manifesto  promettant de nombreuses nationalisations et la création du National Health Service, il est de coutume que les partis d’opposition n’empêchent pas la réalisation des promesses de campagne.

A cette époque, les conservateurs dominaient la chambre des Lords et ont tenté de bloquer les principaux textes présentés par les travaillistes. La crise qui en a découlé a débouché sur un accord qui sanctuarise les engagements pris dans le cadre d’un manifesto public.

C’est tout l’enjeu de la référence, en apparence anodine, qu’a faite ce lundi 13 au matin Nicola Sturgeon. Dans son communiqué officiel, la première ministre britannique a pris, elle, bien soin de ne pas écarter ce référendum. Les traditions sont importantes outre-Manche et la forme encore plus.

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