Sans opposition crédible, le SNP en route pour une nouvelle razzia aux élections régionales

L’Ecosse va-t-elle achever sa mue aux couleurs du Scottish national party ? En tous cas, pour le parti de Nicola Sturgeon, la victoire semble assurée pour les élections locales de 2016. Avec 68 sièges sur 128, les nationalistes écossais disposent déjà de la majorité à Holyrood, siège du parlement régional écossais. Ils ont porté seuls une campagne pour le « oui » lors du référendum sur l’indépendance de l’Ecosse et s’en est suivi une razzia électorale qui a vu 56 des 59 circonscriptions basculer dans l’escarcelle SNP lors des élections générales de mai 2015. S’il en fallait encore, un sondage publié dimanche 6 septembre laisse entendre que 53 % des habitants de l’Ecosse voteraient aujourd’hui en faveur du « oui » à l’indépendance. C’est dans ce cadre que Nicola Sturgeon, la première ministre écossaise, va rendre publiques les grandes lignes de l’action de son gouvernement pour l’année à venir, ce qui lance véritablement la campagne électorale.

De facto, dans cette terre indécrottablement de gauche qu’est l’Ecosse, le SNP a réussi à faire vivre sa déclaration d’intention : il est devenu, dans l’imaginaire collectif, le parti d’opposition à David Cameron. Il profite des errements du parti travailliste dont la leader par intérim, Harriet Harman, a choisi l’abstention sur des mesures de réductions des dépenses sociales en juillet dernier. Le SNP a pris, a contrario, des positions très fermes sur le sujet, allant jusqu’à demander un allègement de la dette grecque avant même le référendum organisé par Syriza en juillet dernier.

Le SNP est devenu une organisation de masseA la fin du mois d’août, et alors que le parlement écossais reprend ses travaux en cette deuxième semaine de septembre, Nicola Sturgeon a fixé le cap de son gouvernement pour 2016. « Il sera fondé sur le progrès dans les services publics, l’économie et la construction d’une Écosse plus juste », a indiqué la dame de fer écossaise. Elle a ajouté que son plan « ambitieux » tirera parti des nouveaux pouvoirs prévus dans le cadre de la loi sur l’Ecosse, consécutive au référendum de 2014. Nicola Sturgeon a indiqué que, depuis 2007 (date de l’accession du SNP au pouvoir en Ecosse), le gouvernement avait tenu ses promesses en matière d’emploi pour les jeunes et les femmes ; de construction de 55,000 logements abordables et « avait protégé et amélioré les services publics ». Cette dernière assertion reste sujette à caution, du côté de l’opposition, puisque le gouvernement écossais n’hésite pas à recourir à la délégation de service public auprès d’opérateurs privés.

Nicola Sturgeon doit aussi faire face à des critiques sur sa stratégie en matière scolaire. Soutenue par un fonds abondé à 100 millions de livres, il avait pour but d’aider les enfants dans des régions défavorisées. Pour l’opposition travailliste, forte de ses 37 sièges à Holyrood, c’est un « constat d’échec » : « Le SNP a été au pouvoir pendant huit ans et son action a généré un recul en matière d’alphabétisation et de maîtrise des notions d’arithmétique, aussi bien que des coupes dans des dépenses », affirme Kezia Dugdale, nouvelle leader du Scottish Labour. En parallèle, le SNP doit aussi faire face à des critiques sur le fonctionnement de la police écossaise dont le chef a démissionné récemment.

Nicola Sturgeon jouit d'une popularité sans égaleL’opinion écossaise semble reprendre à son compte une partie des critiques sur le bilan du gouvernement dirigé par Nicola Sturgeon. En termes d’éducation, à peine 30 % des sondés qualifient son action de bonne quand 19 % la jugent mauvaise. L’écart est bien moindre en matière économique avec 25 % de satisfaits et 24 % d’insatisfaits. Sur le sujet sensible de la santé, les opinions favorables atteignent 34 % contre 29 d’opinions contraires. Mais en termes de politique de sécurité, les ratios s’inversent avec 23 % d’opinion favorables et 29 % d’opinion défavorables. Ces appréciations sur les politiques menées n’empêchent pas le SNP de caracoler en tête des intentions de vote. Dans les circonscriptions, elles atteignent 62 % tandis que le SNP est crédité de 54 % des intentions pour le scrutin par liste régionale. Le système d’élection pour le parlement régional écossais combine en effet scrutin uninominal majoritaire à un tour et scrutin de liste proportionnel à un tour.

Cette enquête d’opinion semble plus témoigner de l’absence de leadership dans l’opposition que de vraie adhésion aux politiques menées par le SNP. Il est vrai que nul parti implanté en Ecosse n’a réussi à faire émerger de figure en capacité de rivaliser avec la princesse d’Holyrood. La popularité de Nicola Sturgeon ne se dément toujours pas et elle est même créditée, personnellement, de la victoire de son parti lors des élections générales. Elle a enfin réussi à faire passer son échec lors du référendum pour une avancée en faveur de l’Ecosse. En fait, protégé par Nicola Sturgeon, le SNP ressemble au Téflon : aucune critique ne semble capable de trouver prise sur lui.

Il y a donc peu de chances que les nationalistes puissent être mis en danger l’an prochain. Pour le parti conservateur, l’Ecosse a toujours été une terre de mission. Le Scottish Labour vient tout juste de se trouver une nouvelle tête, bien fragile. Pour lui, l’enjeu edt de limiter la casse alors que 15% des électeurs travaillistes de mai dernier annoncent qu’ils voteront SNP. Quant aux Lib-Dems, ils sont encore assimilés aux Tories avec lesquels ils ont partagé le pouvoir entre 2010 et 2015, autant dire qu’ils portent la marque du diable aux yeux des Ecossais de la rue. Nicola Sturgeon pourra prononcer son discours de politique générale, donc celui qui lancera sa campagne électorale, cette semaine sans aucune crainte.

Nathanaël Uhl

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