Leicester City champion : le dernier miracle en date du football anglais

« Pas ce soir, mec. Leicester est champion ! » Le tweet politique de Jeremy Corbyn, ce lundi 2 mai en soirée, est vertement retoqué par les troupes du leader travailliste qui sont aussi, pour beaucoup, des fans des Foxes, surnom du Leicester City Football club. Pour la première fois de leur histoire, les bleus remportent la Premier League de football. Il aura fallu un but d’anthologie signé Eden Hazard, offrant l’égalisation à Chelsea face à Tottenham, pour que les Foxes soient assurés que leur plus sérieux concurrent ne puisse les rattraper. Dans la ville des Midlands, la fête a duré toute la nuit. Et les journalistes pariaient pour une journée chômée dans la ville plus connue pour son université et son club de rugby : les Tigers.

Côté pari, les douze qui ont osé miser sur le titre de Leicester en août 2015, avant que la Premier League ne reprenne ses droits, vont toucher le pactole. Les bookmakers donnaient alors les Foxes à 5,000 contre un. Membre du parlement pour Leicester, la travailliste Liz Kendall, qui bénéficiait d’une côte similaire lors de sa candidature au leadership du Labour, n’a pas connu la même trajectoire. Au mois d’août dernier, Claudio Ranieri, le coach des bleus, était décrit comme « mister nice guy », le type bien, incapable de gagner quoi que ce soit. Son passage éphémère à Chelsea, au début de l’ère Abramovitch, crédibilisait le mythe du gars réglo et donc promis à la relégation. De quoi alimenter l’histoire de Leicester City, qui a passé une bonne partie de son existence à jouer au yoyo entre la Premier league et l’équivalent anglais de la ligue 2.

« Trop faible pour l’élite, trop fort pour la D2. »

La fête a duré très tard à Leicester

La fête a duré très tard à Leicester

D’ailleurs, c’est en D2 que les Foxes évoluaient encore lors de la saison 2013-2014. Ils remontent à l’issue de leur septième trophée de champion de cette catégorie. Le club, fondé en 1888, a été racheté par Vichai Srivaddhanaprabha, un milliardaire thaïlandais en 2010. Son entreprise, King Power, dont la bière Shinga est le fleuron, floque le maillot de Leicester City et est devenu le nom du stade où le club évolue. Pourtant, l’équipe type ne vaut « que » 32 millions d’euros et les Foxes affichent le 17e budget du championnat le plus riche au monde. Dans le stade voisin, le club de rugby des Leicester Tigers est doté de 25 millions d’euros de budget…

Depuis le titre de Blackburn en 1995, il n’y a pas eu d’aussi grande surprise dans la Premier League. Autant dire que la nuit a été très longue dans les rues de Leicester. A l’issue d’une saison en forme de conte de fées, les fans se sont lâchés. Et le généreux donateur thaï est devenu leur icône. Au-delà des résultats, les supporters, très suspicieux à son arrivée, apprécient qu’il ne cède pas à l’inflation démesurée du prix des places en Premier League. Du coup, le King Power Stadium concentre un des publics les plus populaires du pays. Et des plus excités, tenant la comparaison avec la Red Army liverpuldienne.

JAmie Vardy, 22 buts cette saison, image du LCFC

JAmie Vardy, 22 buts cette saison, image du LCFC

Comme le raconte So Foot, les fans des Foxes font littéralement trembler la terre. Comme le 27 février dernier, quand à un but tardif de Leonardo Ulloa scellait la victoire de Leicester à domicile. Pour cette occasion, des étudiants en géologie avaient placé des capteurs dans une école située à côté de l’enceinte et ont mesuré une mini-secousse de 0,3 sur l’échelle de Richter lors de la célébration du but. Parmi eux, il y avait peut être une des gloires du foot d’Albion, Garry Lineker, ancien goleador de l’équipe d’Angleterre formé à Leicester, où son père travaille encore sur le marché.

Les nantis de Tottenham, qui resteront éternels seconds pour cette saison, peuvent en crever de jalousie. L’équipe londonienne a été victime du désamour dont elle souffre hors de son quartier. Pour les blues de Chelsea, la confrontation du 2 mai au soir était celle à ne pas perdre, tout en sachant qu’un nul sacrerait assurément les bleus des Midlands. D’ailleurs, sitôt le match fini, Guus Hiddink, manager de Chelsea, a appelé Claudio Ranieri… Un geste que Philippe Marlière, fan d’Arsenal, autre club de la capitale, doit apprécier lui qui commentait sur facebook :

« Les spurs ne seront pas champions ! Quel soulagement ! »

Leicester champion fêté jusqu'en Thaïlande

Leicester champion fêté jusqu’en Thaïlande

Outre que l’équipe de Tottenham soit parmi les plus détestées d’Angleterre, le peuple rouge et blanc aime les « petits ». Et le côté totalement inattendu de la victoire finale du « petit poucet » Leicester ne fait que nourrir la passion britannique pour le ballon rond. Après Nottingham Forest en 1978, Aston Villa en 1981 ou Blackburn en 1995, le sacre des Foxes alimente la féérie d’un championnat qui, malgré la domination outrageuse du big four – Arsenal, Chelsea, Liverpool et Manchester United -, tout reste toujours possible. Finalement, le football anglais assume tout à fait son statut de religion dominante au Royaume-Uni : il est le seul capable d’offrir de tels miracles.

Nathanaël Uhl


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