Brexit : Cameron en difficulté choisit de dramatiser

Après une semaine consacrée aux élections locales, la « reine des batailles » a repris de plus belle. En cette journée de l’Europe, David Cameron a opté pour une approche dramatique pour défendre le maintien du Royaume-Uni au sein de l’Union européenne. Il a estimé, dans un discours prononcé ce lundi 9 mai, que le retrait de la Grande-Bretagne ouvrirait une période de risque quant à la stabilité et à la sécurité du continent. Les partisans du Brexit estiment, a contrario, que c’est l’Union européenne elle même qui met en péril la paix.

La campagne occasionnée par le référendum pour ou contre le maintien du Royaume-Uni au sein de l’Union européenne a repris de plus belle après une semaine de pause. La victoire du travailliste pro-européen Sadiq Khan à Londres ne change rien à l’état des lieux. Le vote majoritaire des Londoniens est acquis au maintien. Tout comme le Devon, la Cornouaille, le Pays-de-Galles et, dans une moindre mesure malgré les déclarations de Nicola Sturgeon, l’Ecosse. En revanche, le sud-est, le Yorkshire, le Nord et l’ouest autour de Manchester penchent vers la sortie. C’est donc bien dans le nord industriel de l’Angleterre que tout peut basculer.

bremain campagnePour l’heure, la dynamique est du côté du Brexit. Quand la sortie s’affiche sur les voitures, les pubs, les panneaux d’affichage géants, le Bremain (camp du maintien) est cantonné aux devantures des librairies, a constaté Silvère Chabot sur place. Sondage après sondage, les intentions de vote voient l’écart se resserrer dans les études qui placent encore le maintien en tête. Dans les enquêtes qui mettent en lumière une majorité en faveur du Brexit, la tendance à la sortie creuse a contrario l’écart. Quoi qu’il en soit le camp du maintien est en état d’alerte maximal.

Cameron a donc choisi l’histoire pour « parler au coeur et à l’esprit » des Britanniques. Citant tour à tout l’empire romain, les guerres napoléoniennes pour finir sur la seconde guerre mondiale, le premier ministre britannique a voulu rappeler les responsabilités historiques du Royaume-Uni vis à vis de l’Europe, dont il est une composante depuis des siècles. Cameron a pu mettre en lumière que la construction européenne est effectivement liée à la plus longue période de paix qu’ai connu le vieux continent depuis la guerre de Cent ans.

David Cameron mal en pointCette dramatisation a été relayée pour telle par la presse favorable au brexit, soit les trois quarts des quotidiens dont l’essentiel des médias conservateurs. « Cameron brandit la menace d’une troisième guerre mondiale en cas de brexit », ont raillé méchamment les titres tels que le Daily Telegraph. Philipp Hammond, secrétaire d’Etat à la défense, a dû se fendre d’un service après-vente en bonne et due forme pour expliquer les propos de son chef de gouvernement. Il a taché de dédramatiser sans revenir sur le risque que la sortie de l’Union européenne faisait planer sur la sécurité collective et la stabilité du continent.

Les partisans de la sortie se sont rués dans la brèche pour défendre la position radicalement inverse. Selon la ministre de la défense (donc subordonnée de Hammond) Penny Mordaunt, c’est au contraire l’Union européenne qui met en péril la stabilité, y compris politique, des pays membres. Selon elle, « les réformes imposées par Bruxelles ont pour conséquence le morcellement du continent et la montée de l’extrême-droite ». La charge est violente et difficilement parrable. Elle met en lumière que – pour l’heure – la campagne est toujours un débat entre tories et tories. Avec, en arrière plan, la succession de David Cameron.

Labour inLes travaillistes, dont 90% des parlementaires sont favorables au maintien, semblent incapables de se faire entendre sur le sujet. Autant dire qu’ils ne pèsent guère dans la campagne. Cette réalité est d’autant plus troublante qu’une partie de l’électorat traditionnel travailliste : la classe ouvrière du nord de l’Angleterre et, dans une moindre mesure, ce qu’il lui reste d’électeurs en Ecosse, jouera sans nul doute un rôle clé le 23 juin prochain. Or, elle est au mieux encline à l’abstention quand elle ne penche pas vers la sortie.

En même temps, la machine électorale et militante travailliste est bien rodée et capable de passer la vitesse supérieure au moment opportun. Les résultats des élections locales le 5 mai dernier l’ont prouvé. Mais c’est la tête qui est encore ailleurs. Depuis le lendemain de l’annonce des résultats, la droite du Labour et la garde rapprochée de Jeremy Corbyn préfèrent se déchirer sur l’analyse des résultats. A ses opposants qui dénoncent « les pires résultats depuis 30 ans », les proches du leader travailliste élu renvoient des pertes minimes sauf en Ecosse quand les tories déplorent deux fois plus de sièges perdus.

Nathanaël Uhl


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